Durant l’élection présidentielle, le candidat Emmanuel Macron s’est engagé à parvenir à un reste-à-charge nul (RAC zéro) pour les malades dans l’optique, le dentaire et l’audioprothèse. Il n’a cependant pas précisé le périmètre des soins concernés ni les modalités de prises en charge financière. Depuis, la stratégie nationale de santé 2018-2022, qui fixe les politiques de santé qui seront mises en œuvre d’ici la fin du quinquennat, n’a pas clarifié grand chose. Elle précise seulement qu’un panier de soins devra être défini.

Ces deux éléments laissent craindre la mise en place de prestations a minima. En effet, le reste-à-charge zéro ne pourrait porter que sur une gamme très restreinte de soins et de prothèses, sans garantie de qualité. C’est alors une nouvelle stigmatisation des populations ayant les plus faibles revenus qui se dessinerait.

L’accès aux soins de toutes et tous est au cœur de l’action des Mutuelles de France. C’est pourquoi elles soutiennent toutes les mesures qui permettent la réduction du reste-à-charge des malades.  Toutefois, pour parvenir à un RAC zéro efficace et juste dans le domaine de l’optique, du dentaire et de l’audioprothèse, quatre conditions doivent être réunies.

1/ L’opposabilité des tarifs

L’ambition de RAC zéro ne deviendra réalité qu’à la condition de mettre en place une politique volontariste des pouvoirs publics en matière de dépassements de tarifs. L’encadrement des prix par la définition de plafonds d’ordre public est une condition essentielle pour réduire l’écart entre le coût et les remboursements. Pour lutter plus globalement contre le renoncement aux soins, il est aussi impératif de s’attaquer aux dépassements d’honoraires, qui contribuent largement aux inégalités d’accès à la santé.

2/ La qualité des prestations

Au-delà de rendre les soins accessibles, il est nécessaire de garantir la qualité de ces derniers. Pour cela, des critères lisibles doivent être mis en place. Les Mutuelles de France seront particulièrement vigilantes à ce que l’instauration d’un reste-à-charge zéro ne conduise pas à une offre de santé au rabais.

3/ L’augmentation de la participation de l’Assurance maladie obligatoire

L’assurance maladie, principale garante de l’égalité et de la solidarité en matière de santé, doit réinvestir les champs qu’elle a désertés depuis des dizaines d’années. A titre d’exemple, les complémentaires santé remboursent plus de 70% des dépenses en optique, contre 4% pour l’assurance maladie obligatoire. Ce secteur a été totalement négligé, ouvrant ainsi la porte à une dérégulation de plus en plus forte. Cette même logique se retrouve dans le dentaire ou l’audioprothèse.

4/ La suppression des taxes sur les mutuelles

En 2018, les complémentaires santé devront déjà assurer le remboursement de plus d’un milliard d’euros supplémentaires (hausse du forfait hospitalier, forfait patientèle, etc.). Face à une telle somme, il est inévitable que cela se traduise par une augmentation des dépenses pour les Français. Or, pour que la mise en place du RAC zéro ait un réel impact sur le renoncement aux soins, il faut que les mutuelles puissent jouer leur rôle sans augmenter les cotisations mutualistes. Pour cela, les pouvoirs publics disposent d’un moyen simple pour faire baisser les cotisations de 13% tout de suite : la suppression des taxes sur les mutuelles.

Ces quatre conditions sont indispensables pour garantir un reste-à-charge efficace et juste. Néanmoins, il est difficilement envisageable d’instaurer un reste-à-charge nul sans, dans le même temps, généraliser le tiers-payant. En effet, si l’objectif du gouvernement est bien de lutter contre le renoncement aux soins en réduisant les contraintes financières, il serait paradoxal de demander aux malades de continuer d’avancer les frais médicaux. Les Mutuelles de France seront donc très attentives au rapport gouvernemental qui sera publié au mois de mars sur ce sujet.