Ce 7 avril 2023, journée mondiale de la santé, marque le 75e anniversaire de l’Organisation mondiale de la santé. C’est en effet le 7 avril 1948 qu’est entré en vigueur la Constitution de l’OMS adopté par la conférence de New-York deux ans plus tôt. Cet anniversaire est l’occasion de mesurer le chemin parcouru en sept décennies et demie, et celui qui reste à arpenter, pour la santé et le bien-être des populations mondiales. C’est aussi l’occasion, pour nous, de faire un point sur les difficultés d’accès aux soins ici, en France. En 2023, dans un contexte post pandémie, la crise de l’offre de soins (crise de l’hôpital public et de la médecine de premier recours) souligne le besoin d’un changement de politique en matière de santé en France. La Fédération des mutuelles de France rappelle que la santé est un droit, pas un privilège, ni une marchandise.
Renoncement aux soins : une situation qui ne cesse de s’aggraver
Les motifs financiers et géographiques demeurent les principales causes de renoncement aux soins. Renoncement qui entraîne des retards de diagnostic et, finalement, une prise en charge médicale plus tardive et des pertes de chances. Pour “maîtriser” les dépenses de l’Assurance maladie, les politiques publiques ont, en parallèle, réduit le nombre de praticiens (« pas de médecin, pas de malade ») et augmenté la participation financière des patients. Ces mesures menacent l’accessibilité financière des soins en santé.
Ce faisant, c’est la Sécurité sociale qui est empêchée de mener à bien ses missions ; par les mesures qui sont prises, elle devient de moins en moins protectrice. En médecine de ville et hors Affection de Longue Durée (ALD), la Sécurité sociale ne rembourse plus qu’1€ sur 2. Les patients pris en charge au titre d’une ALD ont, quant à eux, paradoxalement un reste à charge plus élevé que le reste de la population ! Il est en moyenne de 180 euros en établissements de santé et de 600 euros en ville pour les patients en ALD, contre respectivement 40 euros et 390 euros pour le reste de la population.[1]
Une offre de soins en deçà des enjeux sanitaires
Selon l’Assurance maladie, 6,3 millions de patients (11% des assurés sociaux) sont sans médecin traitant en 2022, contre 5,1 millions en 2017 (8 % des assurés sociaux)[2]. Selon la DREES, 6% de la population vit en 2018 dans une zone sous-dotée en médecins généralistes[3]
Ainsi se caractérise la crise du modèle libéral d’exercice de la médecine. Le dysfonctionnement est patent pour les généralistes et les spécialistes. Cela se traduit par un niveau élevé de renoncement aux soins mettant en danger de la population,44% des médecins généralistes refusent de prendre des nouveaux patients en qualité de médecins traitants.
Repenser l’accès à la santé en ville et à l’hôpital
Il y a urgence à repenser en profondeur l’organisation des soins en ville : régulation négociée de l’installation, développement des pratiques coordonnées et de la médecine d’équipe, organisation du partage des compétences entre professionnels de santé. Il faut aussi, alors que la population vieillit, former plus de médecins, de personnels médicaux et para-médicaux pour permettre aux patients de trouver des professionnels à même de répondre à leurs besoins de soins. Il va falloir changer de paradigme en développant, valorisant et rémunérant à sa juste valeur la prévention et l’éducation à la santé.
Il faut bien sûr résoudre la crise grave de l’hôpital public que dénoncent les professionnels depuis des années. L’hôpital a besoin de moyens humains et financiers, de financements pérennes en tournant le dos au modèle délétère « l’hôpital-entreprise » et d’une vraie reconnaissance de ses personnels.
Il est aussi indispensable de mieux coordonner la médecine de ville, l’hôpital, le secteur médico social pour assurer un parcours complet du patient efficace. Agir pour l’accès aux soins partout et sans barrière financière implique d’augmenter le financement de notre système de santé. Il faut pour cela aller vers davantage de solidarité en supprimant les exonérations de cotisations et en sollicitant l’ensemble des richesses. Aujourd’hui, trop de valeurs sont soustraites à la solidarité. Alors, des marges de manœuvre existeront pour permettre l’accès effectif de toutes et tous, partout sur le territoire, à la santé.
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[1] Etudes et Résultats – DRESS n°1180 janv 2021 – er_1180.pdf (solidarites-sante.gouv.fr)
[2] Citation dans « La pénurie de généralistes, symptôme de la progression des « déserts médicaux » en ville comme à la campagne », Camille Stromboni, Le Monde, 14 mars 2022.
[3] Etudes et Résultats – DRESS n°1144 février 2020 – er1144.pdf (solidarites-sante.gouv.fr)