Depuis peu de temps, on assisterait à une baisse des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT-MP). Une étude de l’Assurance maladie aurait notamment montré qu’en 2016 la fréquence des accidents du travail, tous secteurs confondus, atteignait un taux de 34 accidents par tranche de 1 000 salariés. Le secteur du BTP, pourtant très accidentogène, aurait même connu une baisse de 29 % en 10 ans.
Ces données seraient de bonnes nouvelles si elles ne devaient pas être relativisées par plusieurs éléments.
Tout d’abord, plus d’un million de sinistres AT-MP ont été reconnus en 2016. Un nombre loin d’être négligeable et qui doit faire réfléchir, tout aussi bien au niveau des pouvoirs publics qu’au sein des entreprises. D’autant que le nombre de décès suite à un accident du travail est également frappant. Chaque année, ce sont tout de même près de 500 personnes qui meurent à cause de leur emploi.
A ces chiffres, déjà importants, s’ajoute l’apparition de nouvelles pathologies jusqu’alors invisibles. Grâce à une bonne information et une meilleure connaissance de leurs droits, les salariés n’hésitent plus à les faire valoir. C’est principalement le cas pour les maladies psychiques, dont le nombre de reconnaissances a explosé en 2016, connaissant une hausse de plus de 40 %. C’est aussi le cas pour certains cancers, dont la reconnaissance a augmenté de 10 %.
On assiste aussi à un affaiblissement global de la santé en milieu professionnel, qui pourrait à terme conduire à de nouvelles augmentations des accidents et maladies professionnelles. Cet affaiblissement s’observe essentiellement sous trois aspects.
Premièrement, la médecine du travail a été fortement dépréciée, tandis que les visites médicales obligatoires ont perdu leur intérêt puisqu’elles ne sont pour la plupart plus contraignantes. Deuxièmement, l’instance dédiée à la santé et à la prévention, le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) a été dissoute au sein d’une instance plus large, dont les moyens ne permettront pas de faire avancer la prévention et la protection des travailleurs dans l’entreprise. Troisièmement, la pénibilité, pourtant mise en avant sous le précédent quinquennat, a été complètement mise au ban avec la naissance du compte de prévention et la fin de l’obligation de déclaration de quatre risques majeurs : la manutention de charges lourds, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les risques chimiques.
Alors que la dureté des conditions de travail et leur retentissement sur la santé des salariés est un constat journalier, cette remise en cause de la santé et de la sécurité en milieu professionnel, permise par une succession de réformes libérales du Code du travail, ne semble poursuivre que des objectifs économiques au détriment de l’accès à la santé de toutes et tous.
Tous ces éléments appellent à la plus grande vigilance. Gardons-nous de tirer des conclusions hâtives en analysant trop vite les données de telle ou telle structure. La sécurité et la santé au travail sont des sujets essentiels qui nous concernent toutes et tous. Restons mobilisés et réaffirmons que l’accès à la santé se joue aussi, peut-être même surtout, dans l’entreprise.